La Tourneuse des épinettes 4 repasser « Le Portail »

Avertissement : ce blog est à vocation culturelle, écrit au fil des jours, et la tourneuses des épinettes contient aussi des images de nudité ( jamais de pornographie). Avant de poursuivre, en cas de questionnement sur le sens, on peut se reporter à « Pages » sur ce site.


     Un long moment de fête et de plaisirs simples, amis, soleil, côte de Normandie -Nord ( ce qui est moins complexe que Normandie-Niemen ! ) a reculé le moment d’évoquer François Bizot. Vous ne vous souvenez pas que la mémoire de cet écrivain est revenue en lisant le roman de Nancy Houston, consacré pour moitié à une étrange ( et réussie) introspection historico biographique ( yes! ) de Pol Pot.

 

kmers rouges

     Dans « Le portail«  ( La Table Ronde 2000, et  Folio 2002), François Bizot raconte son arrestation et surtout sa longue et douloureuse détention, mais en insistant aussi sur la cécité des intellectuels français ( dont Jean Lacouture, journaliste très célèbre à l’époque) devant la montée des Khmers dans le Cambodge encore « royal »: une fois encore, sûrs d’eux, les intellectuels professionnels connaissent le monde mieux que personne, malgré les témoignages des acteurs sur place.

     C’est d’ailleurs aussi ce qu’évoque Nancy Houston à propos de l’admiration nettement imbécile pour la Révolution Culturelle chinoise. A Paris, on profite de la vie , les jardins sont chauds, le terrasses au soleil demandent qu’on se rafraîchisse…

     Puis François Bizot est arrêté, enchainé, traité avec l’horreur que croit se permettre sans remords le tortionnaire Khmer , au nom de sa foi en la Révolution du Kampuchéa démocratique. On a oublié ces années – courtes- bouleversantes : un pays plus que décimé, des meurtres et violences de toutes les sortes possible, la famine assumée.

     Douch :  » Camarade, ajouta-t-il péremptoire, il vaut mieux un Cambodge peu peuplé qu’un pays plein d’incapables! »( op cit p192)

     Mais, si tout ce désastre humain est la toile de fond ( parfois insoutenable) du livre-récit, le cœur du livre tient à la relation qui s’établit entre  » DOUCH »-et son prisonnier, le Français. Douch est  patron  de camp glacial , le tragique  » S 21″, et même pas sadique (c’est autre chose, c’est la « conscience politique » de l’épuration d’un peuple ! ), et – cultivé comme la plupart des chefs Khmers rouges – il entretient avec son prisonnier des relations ambiguës : discussions, menaces, rémissions. En même temps, la culture Khmère est dévastée

 

     On le saura plus tard, le « rapport » rédigé sur Bizot( comme sur chacun des innombrables prisonniers) est revenu avec l’ordre de l’exécution, mais Douch ne passe pas à l’acte.

 

Débat : Bizot écrit:  » J’étais pétrifié par la rigueur irrévocable de son discours contradictoire. – Tes idées sont pures et généreuses, camarade, mais elles font peut. Comme je te l’ai dit, je crains que votre révolution ne fasse le lit de vos pires ennemis….Quand va-t-on cesser de faire mourir les hommes au nom de l’Homme? »(ibid ). Pendant ce temps, dédoublés dans leurs visions d’admiration décalée, les intellectuels de France poursuivent leurs déambulations mentales brouillées par le désir de voir ce qu’on désire voir : grâce et volupté

 


     Ensuite-et le récit est subtil dans ses allers-retours – Bizot est libéré. Il raconte son retour, ses errances, les moments tragi-comiques des relations avec  » son  » ambassade( Bizot était déjà chercheur à l’Ecole Française d’Extrême Orient), mêle les histoires de ses amours et des ses déconvenues, ses affrontements pas seulement verbaux avec les révolutionnaires, des effarants moments de l’exil-un long cortège quittant le Cambodge de plus en plus fermé sur lui-même, des morts, des exactions, de la peur vue et sentie.

Le livre se termine sur un dernier chapitre : Bizot revient, plus de quinze ans après, sur les lieux…surprenants instants de chevauchement des mémoires. Il découvre l’ampleur réelle de la violence d’Etat, le génocide. Il ne sait pas encore, à ce moment ému et complexe( il est resté amoureux de ce pays) qu’il devra de nouveau traverser les paysages violents d’une mémoire douloureuse, car il sera cité comme témoin au procès intenté à « DOUCH ». C’est un autre livre! Autre horizon, autre exposition (NB : pour répondre aux sardoniques sourires dévastateurs d’amis, j’ajoute un auto-nu à chaque « Tourneuse », par volonté d’une forme d’équilibre dans » l’exposition. » )

 

 

Petite leçon – sans doute moins d’actualité puisque nous sommes dans un univers qui paraît de moins en moins « engagé » : il s’agit de la  » visite » de communistes français sur place ( on début années 70):  » Cet affichage, par des intellectuels parisiens, de fraternité avec les pauvre Khmers rouges me semblait ridicule et déplacé. Que comprenaient-ils de leurs mobiles et de leur langue, de leur histoire et de leur révolution ? Quasiment rien… « (ibid p 328)

A suivre, ici même, si vous vous intéressez à….

tourneuse texte

Rappel : pour répondre aux sardoniques sourires dévastateurs d’amis, j’ajoute un auto-nu à chaque « Tourneuse », par volonté d’une forme d’équilibre dans l’exposition.


François-louise TOFFIN

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